Nioques N°4

Premier roman inclassable, Les Hémisphères de Magdebourg met en parallèle le sentiment de perdition d’une orpheline et la cruauté d’un vulgaire trafiquant d’art.
La revue Nioques rappelle avec Francis Ponge, que « gnoque », « forgé, dit-il, par moi à partir de la racine grecque signifiant connaissance », renvoie paradoxalement à une idée d’ignorance, son seul savoir étant celui de ses « noms impropres ». Pas étonnant d’y lire des textes aux gueules cassées, prenant à bras le corps les mythologies modernes pour les tordre comme des serpillières : les poèmes de la Brésilienne Angelica Freitas sont assez comiques, irrévérencieux et scabreux pour retenir, à l’exemple de ce « gertrude stein a un de ces culs viens par là gertrude/ stein et quand elle vient par là elle fait un de ces bruits comme/ si quelqu’un passait un chiffon mouillé sur la vitre ». Plus loin, Rilke lui « aurait filé rendez-vous au jardin des plantes » et, dit-elle, « lou-andreas m’attend à göttingen nous nous roulerons des pelles à gänseliesel ». Mais ce n’est pas fini, Michele Zaffarano, avec « Blanche comme la neige », nous donne de multiples conseils à l’impératif, qui ne serviront à rien sinon à user la machine paternelle, juste avant d’obliquer vers un Tarzan « nu/idiot ». L’arrêt à la station Hubert Lucot plonge, elle, dans une élégance d’un tout autre ordre : l’auteur revient, dans une prose trouée de perceptions d’une grande jeunesse, vers « Trois grâces » connues dans les années cinquante, décrivant avec une naïveté presque cinématographique comment l’une d’elle quitta sa robe chair, cinquante ans après les premiers regards.
Nioques N°4 136 pages, 15 € (Éditions Le Mot et le reste)